Un parc d’attractions à deux brasses des temples d’Angkor ?

Une société chinoise spécialisée dans les casinos projette d’installer un parc d’attractions à 500 mètres du site classé au patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1992. Le complexe aquatique ‘Angkor Lake of Wonders’ inclurait entre autres une rivière enchantée, une piscine à vagues, une cascade, un toboggan, ou encore un marché flottant. Le tout dans un décor de grossières copies de sculptures d’Angkor, sans oublier des boutiques, des restaurants et un hôtel de neuf cents chambres.

La société NagaCorp, déjà propriétaires de casinos au Cambodge, a annoncé en 2020 avoir obtenu l’agrément du Premier ministre cambodgien, le controversé Hun Sen. L’exploitation du site pourrait en effet rapporter à terme un milliard de dollars au pays.

Lors de la réunion du Comité international de l'Unesco portant sur le site historique d'Angkor, fin janvier, les experts ont jugé le projet chinois incompatible avec l’esprit de préservation du site. La menace d'un afflux massif de touristes en provenance du parc d'attractions inquiète pour le site, déjà victime de son succès. La proximité avec Angkor Lake of Wonder ne pourrait qu’augmenter le nombre déjà très (trop ?) important de visiteurs.

Un problème écologique se pose aussi. Angkor était une ville hydraulique, et tout un réseau de canalisations y avait été installé. La mission de l'Unesco avait, notamment, pour but de réhabiliter celui-ci, endommagé après des siècles sans entretien. Objectif rempli puisque l'eau est redevenue un élément central du lieu. Le parc aquatique pourrait menacer cet équilibre retrouvé, d'autant que la présence de visiteurs étrangers implique une consommation d'eau, par personne, plus de quarante fois supérieure à la moyenne (trois cents litres par jour contre sept pour un Cambodgien).

Tout cela pourrait pousser l’Unesco à se désengager d’Angkor. Les experts rejettent l’idée d’un parc à moins de trente kilomètres de la cité, qui ‘affecterait gravement l'image de la valeur universelle exceptionnelle qui lui a été reconnue par le Comité du patrimoine mondial en décembre 1992’. D'autant plus qu'en 2013, le premier ministre cambodgien Hun Sen rappelait sa volonté de ‘protéger Angkor, héritage sacré de l'humanité’. Le bras de fer a commencé.